clause de cession

CLAUSE DE CESSION

Qu’est-ce que la clause de cession ?

Lorsqu’il y a changement de propriétaire ou d’actionnaire majoritaire, qu’il s’agisse de la cession de toute l’entreprise ou seulement du titre auquel il collabore, le journaliste peut partir, de sa propre initiative, en invoquant ce droit et en bénéficiant des indemnités légales de licenciement et des allocations chômage ensuite, s’il ne retravaille pas.

Qui peut bénéficier de la clause de cession ?

Tous les journalistes et journalistes pigistes réguliers, quelle que soit leur ancienneté, dont l’entreprise ou le titre est vendu. Une exception notable toutefois : les journalistes qui travaillent en agence de presse ne peuvent bénéficier de ce droit (les journalistes de RMC Sport ne sont donc pas éligibles). Les agences ne sont pas citées dans l’article du Code du travail qui parle de la clause, et la Cour de Cassation a refusé d’en faire une lecture extensive.

Toutefois, pour la clause de cession précédente, un accord de rupture conventionnelle avait été signé entre les syndicats et la direction pour permettre aux journalistes de RMC Sport de bénéficier de conditions de départ identiques à celles de la clause de cession. La direction a assuré vouloir faire de même pour la clause de cession à venir.

Les journalistes qui seraient en congé sabbatique au moment de l’ouverture de la clause peuvent également faire jouer leur clause de cession. Il est arrivé que certaines directions considèrent que, pendant la suspension du contrat durant le congé sabbatique, elles n’étaient pas tenues de répondre au courrier de clause de cession d’un journaliste. La jurisprudence a naturellement sanctionné une telle attitude (Cass., Soc., n°04-40.911), mais cela montre que des difficultés peuvent se présenter. Nous nous assurerons en CSE que la direction s’engage à bien considérer les clauses de cession des salariés en congé sabbatique.

Attention: en prenant la clause, vous ne pourrez pas retravailler dans le groupe dans le futur.

 

 

Quand s’ouvre la clause de cession ?

Lorsque la vente est réalisée. Ce n’est pas le chef d’entreprise qui “ouvre” la clause de cession mais l’acte de vente. La clause de cession s’impose à l’acheteur et non au vendeur. C’est donc au nouvel employeur qu’il faut envoyer son courrier.

Toutefois, la future direction a fait savoir qu’elle souhaiterait limiter fortement le délai de la clause (ouverture d’octobre à décembre alors que la vente effective se ferait courant juillet), au mépris du Code du travail. Ce positionnement illicite obligerait les salariés à saisir le Conseil des Prud’hommes s’ils décident de faire jouer leur clause de cession en dehors de la période voulue par la direction.

 

 

De combien de temps bénéficient les journalistes pour prendre leur clause de cession?

En théorie, cette clause s’ouvre mais ne se ferme jamais (même si cela risque d’être compliqué de la faire valoir 10 ans après). En pratique, le repreneur peut, éventuellement par accord avec les syndicats, indiquer un délai pour que les journalistes se décident. Ce n’est qu’une recommandation, sans valeur légale. Légalement donc, même si l’entreprise ne donne qu’un court délai, le journaliste peut dépasser cette date pour se décider. Mais là encore, étant donné le positionnement de la direction, il est probable que vous soyez contraint.e de saisir le Conseil des Prud’hommes pour faire valoir vos droits.

 

 

Un employeur peut-il contester une clause de cession prise par un journaliste ?

L’employeur peut tenter de s’opposer au droit du journaliste, notamment si le “délai”, lui paraît trop important. Le journaliste argumentera que ce droit est imprescriptible (sans délai légal). Cela peut se terminer en justice. Mais même si ce risque existe, la règle est l’imprescriptibilité et le journaliste a le droit et le devoir de réfléchir en pleine conscience et avec tous les éléments dont il dispose, à son avenir au sein d’une entreprise qui a été cédée à un tiers.

 

 

Un employeur peut-il obliger un salarié à prendre la clause de cession ?

Non, c’est un acte individuel et volontaire. S’il veut profiter de la cession pour faire partir un journaliste, il doit évidemment motiver sa décision de le licencier.

thomas.leonetti@alticemedia.com

Comment procéder ?

Par lettre recommandée avec accusé de réception à la direction pour lui faire part de sa décision de faire jouer la clause de cession en vertu de ce droit reconnu par le Code du Travail avec copie à l’inspection du travail.

Comment rédiger la lettre ?

Évoquer dans une première partie le motif : la vente ou la cession de l’entreprise. Puis, dans une deuxième partie, l’acte volontaire et légal : le statut de journaliste qui donne le droit de quitter l’entreprise dans le cadre de l’exercice de la clause de cession, en vertu de l’article L.7112-5 du Code du Travail. Attention : le mot “démission” ne doit jamais être employé par le journaliste.

Au contraire de la clause de cession, la démission induit une rupture du contrat de travail sans procédure de licenciement et sans ouverture de droits à l’assurance chômage! à la différence d’une clause de conscience qui doit être argumentée, la clause de cession ne se justifie pas. Inutile donc de faire du zèle dans la lettre recommandée.

Doit-on faire un préavis ?

Au contraire de la clause de conscience, la clause de cession comporte l’exécution du préavis. Il est d’un mois si le journaliste a travaillé moins de deux ans. Au-dessus de deux ans de présence dans l’entreprise, en l’absence de jurisprudence précise, il vaut mieux laisser la direction en décider. Il pourra être d’un ou de deux mois. Si l’employeur dispense le salarié de faire son préavis, il a néanmoins l’obligation de le payer (il figurera dans le dernier bulletin de salaire sous forme d’indemnité compensatrice de préavis et allongera d’autant le délai de carence avant indemnisation du chômage). Mais si c’est le journaliste qui demande à être dispensé de l’exécution, il dispense par là-même l’employeur de le rémunérer.

Que se passe-t-il à la fin du préavis ?

Il faut récupérer son « solde de tout compte » sur les bases légales d’un licenciement. Il faut aussi récupérer la feuille qui sera destinée à France Travail – même si l’on a retrouvé un emploi : on ne sait jamais de quoi est fait l’avenir… Il faut “faire ouvrir ses droits”, quitte à n’en bénéficier ni immédiatement… ni ultérieurement.

Que faire si l’employeur “ignore” la clause de cession ?

Si le nouvel employeur reste muet ou refuse la clause de cession, il appartient au journaliste de saisir les délégués syndicaux pour qu’ils lui rappellent ses obligations. A défaut, il peut s’adresser au Conseil des prud’hommes. Quand plusieurs journalistes connaissant la même situation, ils peuvent déposer leurs demandes le même jour afin que les affaires soient jointes. Ils peuvent prendre le même avocat afin que ce dernier prépare des conclusions communes assorties de variantes individuelles.

Quelles indemnités ?

Ce sont les mêmes que dans le cadre d’un licenciement. Elles se calculent donc sur le dernier salaire brut (obligatoirement le plus haut), en incluant toutes les primes fixes (comme les primes d’ancienneté par exemple) auquel on ajoute 1/12e pour tenir compte du 13e mois. Lorsque le salaire fluctue, comme c’est le cas pour les journalistes pigistes mais aussi pour les temps partiels qui exécutent des heures complémentaires ou pour ceux qui perçoivent des primes de nuit ou des frais réintégrés dans le salaire, la convention collective autorise que l’on calcule le salaire servant de référence pour déterminer l’indemnité de licenciement sur les 12 ou 24 derniers mois travaillés, en choisissant la moyenne la plus avantageuse pour le salarié.

Le journaliste perçoit une fois ce salaire dit “de référence” par année travaillée (période de 12 mois à partir de la date d’embauche, pas années civiles). La dernière année, même incomplète, compte pour une année pleine. Les congés payés non pris doivent être payés. Ils figurent sur le dernier bulletin de salaire sous l’intitulé “indemnité compensatrice de congés payés”. (ils viendront ensuite allonger le « délai de carence » de l’assurance chômage). Les RTT non prises doivent être payées aussi (à la différence des congés payés, elles n’entreront pas dans le délai de carence fixé par Pôle-Emploi). L’indemnité de licenciement des journalistes professionnels est “légale” (elle figure dans le code du travail). Elle n’est pas imposable.

Que se passe-t-il pour le journaliste qui a plus de 15 ans d’ancienneté ?

C’est la Commission Arbitrale (paritaire) et elle seule qui a compétence légale pour déterminer le montant de l’indemnité de licenciement d’un journaliste licencié alors qu’il a plus de 15 ans d’ancienneté dans l’entreprise. Cette indemnité n’est pas imposable si, et seulement si, elle a été déterminée par la Commission arbitrale.

La Commission peut être saisie directement par le journaliste. Dans ce cas, le secrétariat de la commission se retournera vers lui pour lui demander de choisir une organisation syndicale pour désigner les arbitres. En effet, seules les organisations syndicales représentatives peuvent désigner des arbitres (on vous conseille évidemment le SNJ ou le SNJ CGT). – Le syndicat choisi désigne par lettre recommandée les deux arbitres qui siégeront à la commission et il propose le nom d’un président.

Les frais engendrés par la saisine sont partagés entre le journaliste et l’employeur.

Peut-on bénéficier d’une formation ?

Oui. Dans la lettre de licenciement, l’employeur doit mentionner les droits du journaliste en matière de DIF (droit individuel à la formation) : nombre d’heures acquises, possibilité de les utiliser pendant le préavis, portabilité (article L 6323-17). Si le journaliste n’a pas utilisé ces heures avant la fin du préavis, il peut/doit demander leur transférabilité afin de les mobiliser auprès de l’organisme paritaire de branche (Afdas) ou du nouvel employeur. Par ailleurs, dans les 12 mois suivant la rupture, tout journaliste peut faire valoir son droit à CIF (congé individuel de formation) auprès de l’organisme paritaire de branche. Compte tenu du versement à l’AFDAS des contributions obligatoires concernant les journalistes pigistes de presse écrite, ces derniers doivent s’adresser directement à l’AFDAS pour toute action de formation relevant du DIF ou du CIF.